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Interview d’Isabelle Racoffier, présidente nationale de l’ageem

Développer l’estime de soi pour construire une société respectueuse des valeurs.

Après son discours lors du lancement du congrès, le 20 mai à Dijon, Isabelle Racoffier, présidente nationale de l’AGEEM répond à nos questions

AGEEM : Le thème retenu pour le congrès ageem de Dijon en 2016 porte sur l’estime de soi chez l’enfant et chez l’enseignant. C’est en phase avec ce que préconise actuellement l’institution. Est-ce à dire que l’un ne va pas sans l’autre ?
Isabelle Racoffier : pour enseigner, il faut qu’il y ait engagement personnel chez l’enseignant d’une part de son estime de soi et d’une vraie réflexion sur lui-même.
En tant qu’enseignant, on n’est pas qu’un rôle, on est aussi un être humain. Si on se mésestime, il y a de fortes chances qu’on transfère cela sur l’enfant. Je suis donc favorable à une formation qui place l’enseignant comme acteur, et je suis un peu réservée sur la mise en place de ces formations à distance de type informatif qui ne mettent pas les gens dans le ressenti, dans l’action et dans l’analyse.
Sans mouvement, l’être n’existe pas. Pour être acteur, il faut pouvoir oser, s’exposer. S’exposer c’est s’ouvrir et s’engager. Ne pas oublier que dans « exposer », il ya « oser ». C’est un peu ce que l’on fait lorsqu’on présente une exposition pédagogique, on se met en mouvement, on s’engage. C’est peut-être critiquable mais cela a le mérite d’être, d’exister.

AGEEM : Pourtant le mouvement des enseignants n’implique pas forcément le mouvement de l’enfant. Les enseignants peuvent être acteurs sans que les enfants le soient.
I.R. : L’objectif c’est que les enfants soient acteurs, en cela je suis d’accord avec les propos du recteur. Et le congrès de Dijon entre pleinement dans la mise en place des nouveaux programmes qui fixent comme objectif de permettre à l’enfant de se construire comme personne singulière au sein d’un groupe.
En tant que représentante ageem dans la commission des programmes, j’avais demandé que l’on retire ce « devenir élève » car ce n’est pas une finalité de l’école maternelle. Une des finalités de l’école c’est de « devenir citoyen » c’est-à-dire « je m’engage, je fais des choix, je me mets en action », sinon il n’y a pas de démocratie possible. Élever l’enfant, ce qui veut dire l’emmener plus haut que là où il est, dans la réflexion, dans le savoir, etc… oui, bien sûr que ça c’est un objectif. Mais dans la compréhension des programmes, cela s’est traduit par conférer à l’enfant, au lieu de l’élévation attendue, un statut d’exécutant d’un pouvoir en place pour se conformer au modèle de l’école.
Qu’on ait un axe , au sein des nouveaux programmes, qui amène l’enfant à comprendre l’école et ses demandes, je suis complètement d’accord mais ce n’est qu’une partie de ce qui va permettre à l’enfant de devenir autonome, de faire des vrais choix de citoyen.

AGEEM : Donc d’une certaine manière l’ageem est une association totalement subversive ?
I.R. : (rire) Je ne sais pas si l’on peut dire les choses de cette manière, en tout cas pour moi c’est un endroit où fait des choix. On fait le choix de notre formation, que l’on se paie, et c’est un engagement fort que certains critiquent d’ailleurs. On y met des deniers mais on récolte beaucoup. Les enseignants qui ont suivi beaucoup de congrès de l’ageem ont une formation théorique très pointue. Ils ont une connaissance d’expériences pédagogiques multiples, via les échanges.
Je le mesure, en particulier lors de stages de formation d’enseignants, et je vois la différence avec une « enseignante ageem » en termes d’ouverture, en termes de connaissances, et justement en termes de communauté professionnelle.

AGEEM : Mais faire que les élèves soient acteurs et deviennent citoyens, n’est-ce pas là un peu subversif ?
I.R. : C’est peut-être subversif mais c’est le poids de la démocratie. C’est ça la démocratie et la laïcité ; je fais un métier et je suis dans un cadre. Il n’y a pas de réalisation réelle de l’être sans cadre. Le premier cadre qui nous est donné c’est le ventre de la mère. La vie n’est possible que dans un cadre qui est posé, et la démocratie c’est développer la liberté dans ce cadre. Nous, on fonctionne avec les programmes, avec l’institution mais à l’intérieur de ce cadre, on a notre entière liberté.
Dans nos choix de congrès, c’est très rare qu’on ait une réflexion sur le choix de nos intervenants par exemple. Le choix des thèmes de congrès c’est une liberté qu’on doit revendiquer haut et fort, indépendamment des pouvoirs en place. De plus nous avons une tradition orale de transmission. Ce n’est pas pour rien qu’il y a un principe physique de passation entre équipes en fin de chaque congrès. Et ça c’est un engagement profond.

AGEEM : précédemment, il semble que l’on parlait davantage du « vivre ensemble » et de la qualité de ce vivre ensemble donc du collectif. Or le congrès 2016 met en exergue l’estime de soi, davantage tournée vers la prise en compte de l’individu. N’y a-t-il pas là une sorte de contradiction ?
I.R. : Oui mais cela ce n’est prendre qu’une partie de l’estime de soi, Il n’y a pas d’estime de soi si on n’est pas en relation avec autrui.
Savoir d’où l’on vient, connaître sa propre histoire, personnelle et familiale, faire des choix sur ce que l’on veut perpétuer ou ce dont on veut se délester, reconnaître en soi ses forces et ses faiblesses, sont des essentiels pour l’estime de soi. Avoir la capacité de rechercher de l’aide, de demander, de s’emparer d’idées nouvelles, de se remettre en cause sans se sentir dévalorisé, pour construire avec l’autre qui est différent de soi un projet commun sur des valeurs humanistes, cela nécessite d’élaborer peu à peu l’estime de soi.
Cela me renvoie au livre de Catherine Gueguen «Pour une enfance heureuse » et à la thérapie évoquée qui permet à un enfant, ou un adulte, de digérer une histoire difficile et de la transformer, voire la transmettre, en quelque chose qui sera bien pour le collectif. Donc pour moi, il n’y pas d’estime de soi s’il n’y a pas le vivre ensemble en parallèle.

AGEEM : On parle de l’estime de soi chez les enfants et chez les enseignants, mais l’estime de soi chez les parents d’élèves, troisième acteur éducatif, c’est aussi un axe qui pourrait être envisagé ?
I.R. : Bien sûr, c’est en corrélation, sauf que l’école ne peut pas agir directement ; elle peut agir sur l’enfant d’un point de vue symbolique. L’école peut donner le plan symbolique en passant par l’action. C’est tout ce qu’on fait avec les jeux de doigts, les histoires, les marionnettes, et aussi lors des moments de poésie et de lecture de contes qui se révèlent très structurants. Il faut que l’enseignant sache qu’à ce moment-là, il est en train de travailler le symbolique.
L’estime de soi est à construire à la fois pour les adultes et pour les enfants, car il est difficile voire impossible d’éduquer les enfants en ce sens lorsque les adultes se mésestiment eux-mêmes. Nous ne pouvons pas construire une société laïque, respectueuse des valeurs, sans une bonne connaissance de soi chez les individus qui la composent.
Un enjeu de la formation des enseignants pour la maternelle, c’est comment faire quand on prend un enfant avec une histoire et que l’on veut essayer de l’emmener plus loin, le faire rentrer dans le symbolique parce qu’il fait de l’art, de la musique, des jeux de doigts, etc. pour qu’il puisse apprendre, même si son histoire est difficile. S’il ne rentre pas dans le symbolique, il n’apprendra pas. Je me bats pour que les enseignants sachent pourquoi ils font ça, quel sens profond cela a pour eux de développer ce plan symbolique. Un enfant doit avoir du plaisir à apprendre, trouver du sens dans sa vie de tous les jours et conscientiser l’apprentissage tout en jouant.
En conclusion, ce qui est important pour moi c’est l’enthousiasme et l’envie de faire ensemble, avec le plaisir d’apprendre, dans la joie et le bonheur. Le vivre ensemble c’est construire une société qui soit autre ; que l’on soit enseignant ou autre, on a envie de vivre en commun. Un beau congrès en perspective !


Interview Isabelle Racoffier

Anne Dillenseger

L’école maternelle :
une école de l’autonomie

Anne Dillenseger, adjointe à la Ville de Dijon, chargée de l’Education, était présente le 20 mai dernier lors du lancement du 89ème congrès de l’AGEEM.

AGEEM : Le thème du DSC_0039congrès est l’estime de soi chez l’enfant et chez l’enseignant. C’est un peu dans l’air du temps à l’Education nationale, mais est-ce que l’un ne va pas sans l’autre ?
Anne Dillenseger : Je trouve en effet que c’est important car si l’on veut travailler sur l’estime de soi, il faut déjà savoir où on en est soi-même en tant qu’éducateur, car je considère que les enseignants sont des éducateurs, il faut être au clair avec ce sujet-là, avec son propre parcours, sa propre histoire pour pouvoir avancer avec les enfants.

AGEEM : On parle, dans le cadre de ce congrès de l’enfant, de l’enseignant mais est-ce que l’on pourrait aussi étendre cela à l’animateur et aller sur les champs de compétences de la Ville ?
A.D. : Bien sûr, et ce d’autant plus qu’il y a beaucoup d’animateurs qui ont un vrai problème de reconnaissance et d’estime de soi. Parce qu’ils sont persuadés qu’ils ne sont pas bons, parce qu’ils ont eu des parcours scolaires parfois difficiles. En tout cas il y aurait beaucoup à faire c’est certain.

AGEEM : Pour continuer, dans les personnes qui sont autour de l’enfant, est-ce qu’il ne faudrait pas aussi parler de l’estime de soi chez les parents?
A.D. : Là on entre dans le domaine du privé. Cette estime est à développer mais par qui, comment, sous quel angle ? Pour le coup, je pense que les parents, dans un premier temps, au niveau de l’école et des acteurs autour de l’école, ont déjà besoin de reconnaissance. Après, l’estime de soi pourra peut-être en découler sauf s’il y a trop de blocages.

AGEEM : Il y a quelques années, on parlait plutôt du “Vivre ensemble” . C’est une notion plus collective alors que l'”Estime de soi” est tournée vers l’individu. Est-ce contradictoire ?
A.D. : Non pas du tout. Je pense qu’il faut savoir se connaître, savoir où on en est, être reconnu pour pouvoir aller vers les autres, et se sentir bien au sein d’un groupe. C’est la base. On devrait commencer par cela, toujours.

AGEEM : D’un point de vue pratique, la venue du congrès à Dijon c’est environ 1000 congressistes, qu’en attend la Ville de Dijon ?
A.D. : On en attend beaucoup. Je passe sur le côté “faire briller la ville” car c’est surtout l’émulation que cela va provoquer dans les écoles maternelles, auprès des équipes qui auront plus envie encore de travailler ensemble, d’aller plus loin et pourquoi pas de travailler avec les autres acteurs de l’éducation.

AGEEM : Est-ce que vous avez prévu par exemple que des personnes de la Ville puissent participer au congrès ?
A.D. : On attend des invitations et évidemment si l’on est invité on participera. Je sais que certains cadres seraient très intéressés. Ce soir par exemple, j’ai demandé à la directrice de l’Education si elle voulait venir mais elle m’a répondu qu’elle n’était pas invitée donc qu’elle n’osait pas. À vous de jouer donc ?

AGEEM :  D’accord. Tout à l’heure, Monsieur le recteur a évoqué la Maternelle en la comparant avec l’Élémentaire et le Collège. Est-ce que vous partagez la même vision ?
A.D. : Oui, tout à fait. Je suis convaincue, de par mon entourage, que l’école maternelle a un rôle déterminant sur la suite du parcours de l’enfant. Cela est très clair.  Et pour les enfants qui n’ont pas eu cette chance, je pense à l’Allemagne ou à la Suisse que je connais, ce n’est pas tout à fait la même chose même s’ils sont allés en collectivité.  Ce qui est déjà bien. Mais Il n’y pas que la collectivité, il y a une vraie progression de la petite section à la grande section, sur l’autonomie, sur un début d’apprentissage. Les enfants quand ils arrivent au CP, ne se comportent pas du tout de la même façon s’ils ont été ou pas en école maternelle.

AGEEM : Est-ce que vous pensez que la pédagogie est différente en maternelle, moins transmissive ?
A.D. : Je ne suis pas pédagogue mais oui je pense qu’à l’école maternelle on est beaucoup dans l’écoute et que l’enfant peut s’exprimer. Après, cela devient plus compliqué parce du jour au lendemain il rentre au CP, il faut qu’il reste assis, en rang. Moi qui visite les écoles, je vois bien que rares sont les enseignants qui changent la disposition de la classe. Dès le CP, on voit les enfants sur trois ou quatre rangées, ils ne peuvent plus se lever. C’est un peu radical comme changement et on comprend que pour certains ce soit difficile.

AGEEM : L’école maternelle, une école subversive alors ?
A.D. : Non, au contraire, c’est l’école de l’autonomie.

AGEEM : L’AGEEM est une association d’éducation populaire. Ces associations sont-elles des partenaires indispensables à l’école ?
A.D. : Evidemment. En 2001, on a eu des débats avec certains collègues sur est-ce-que l’on travaille entre nous pour notre projet éducatif ou avec l’éducation populaire. Certains collègues n’étaient pas d’accord pour travailler avec d’autres mais heureusement la sagesse l’a emporté. L’éducation populaire est une vraie richesse. Elle nous ouvre les portes, nous permet de réfléchir. Si l’on reste entre nous, on n’avance pas.

Interview Anne Dillenseger

Article de “La Gazette” – Dijon – 20 mai 2015

DIJON VA ACCUEILLIR UN CONGRÈS NATIONAL D’ENSEIGNANTS DE MATERNELLES

mercredi 20 mai 2015 à 13:05 | Par Gaëlle Jouanne (GazetteInfo.fr)

C’est à Dijon que va se tenir du 3 au 5 juillet 2016 le 89e congrès national de l’Association générale des enseignants des écoles et classes maternelles publiques (Ageem). Un événement considérable -un millier de professeurs sont attendus- qui est officiellement lancé ce mercredi soir. Interview de Catherine Pascual, permanente vice-déléguée de la section de Côte-d’Or.

GazetteINFO.fr : En quoi est-ce un événement pour l’Ageem de Côte-d’Or et pour la ville.

Catherine Pascual : Le congrès national représente le temps fort de l’association. Dijon l’accueille une fois tous les 30 ans environ ! C’est une occasion unique d’engager les équipes enseignantes et les élèves des écoles maternelles, de mettre en lumière ce qui se passe dans les classes dijonnaises et de la Côte-d’Or. Et pour la ville, imaginez les retombées économiques liées à la présence trois jours d’un millier de congressistes.

Le thème est « L’estime de soi chez l’enfant et l’enseignant ». Pourquoi ce choix ?

Il recouvre le nouveau programme de la maternelle et de ce fait intéresse tous les participants. Au-delà de cela, c’est un sujet majeur car l’estime de soi permet à l’enfant et à l’adulte d’être dans de bonnes conditions pour apprendre et enseigner. Le petit se rendra compte qu’il est un individu singulier au sein d’un groupe, une manière de travailler sur le vivre-ensemble dans un temps où les valeurs de la République sont mises à mal.

Que recherchent dans ce congrès les enseignants qui y participent ?

C’est un lieu d’échanges et de conférences où professeurs et chercheurs se rencontrent. Un maillage entre terrain et monde de la recherche. Le congrès se veut un laboratoire d’idées et de réflexions. A noter que l’apport théorique est réel : nous sommes reconnus comme un espace de formation.

Pourquoi lancer officiellement un congrès plus d’an avant qu’il n’ait lieu ?

Cet événement représente trois ans de travail. L’an dernier, la section de Côte-d’Or a communiqué autour de son projet auprès du rectorat, de la mairie et de ses partenaires et établi un dossier de faisabilité. Cette année, nous avons conçu le guide de réflexion à destination des enseignants présenté ce soir. Il lance toutes les actions de réflexions puisqu’il sera diffusé nationalement en septembre afin que les classes puissent travailler dessus en 2015-2016.

Article sur le site GazetteInfo.fr

Article du “Bien Public” – Dijon – 20 mai 2015

Un congrès national à Dijon autour de l’école maternelle

le 20/05/2015 à 22:47 | F.J. 

L’année 2016 sera très dijonnaise pour l’Association générale des enseignants des écoles maternelles (AGEEM). C’est en effet la section Côte-d’Or qui accueillera le 89e congrès national du 3 au 5 juillet au Palais des congrès de Dijon avec le soutien du rectorat, en particulier de l’inspection académique, de la ville de Dijon et du Grand Dijon.

1 000 congressistes du monde entier

L’association parle ainsi d’« un rendez-vous unique où enseignants, chercheurs et éditeurs se réunissent pendant trois jours autour de conférences plénières, de communications, d’expositions pédagogiques, d’un salon d’éditeurs pour mutualiser, échanger et faire fructifier les recherches concernant l’école maternelle sur un thème donné, chaque année dans une ville différente. Plus de 1 000 congressistes viendront de la France entière et de l’étranger (Liban, Cameroun, Algérie…) pour réfléchir sur un thème porteur et d’actualité : « L’estime de soi chez l’élève et l’enseignant ».

L’article sur le site du Bien Public

Lancement du congrès le 20 mai 2015 à l’école maternelle V. Hugo

Lancement du 89ème congrès à Dijon en 2016 « L’estime de soi chez l’enfant et l’enseignant »

En présence de Denis ROLLAND (recteur de l’Académie de Dijon), Evelyne GREUSARD (Directrice Académique de Côte-d’Or), Annie SIMONET (Adjointe à la directrice académique), Anne DILLENSEGER (Adjointe au maire de Dijon déléguée à l’éducation), Philippe RATAT (directeur adjoint de Canopé), des membres du bureau national de l’AGEEM sous la présidence d’Isabelle RACOFFIER.

Le mercredi 20 mai 2015 à 17h30 à l’école maternelle Victor Hugo.